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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE |
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Edouard Boeglin In memoriam
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Entre Bracke et Guesde, Edouard Boeglin, à l'OURS, 86, rue de Lille, pendant le déménagement, en décembre 2006. | | Edouard Boeglin (1942-2009)
Né en 1942, Édouard Boeglin est décédé dans sa ville de Mulhouse le 16 avril dernier. Journaliste, essayiste, communicant hors pair, citoyen engagé dans la vie de la Cité, franc-maçon du Grand Orient de France, il a été lié à la vie de l’OURS depuis 1970.
Édouard était commandeur des Palmes académiques. La seule décoration qu’il ait acceptée… sorte de clin d’œil, bien sûr, à l’Éducation nationale qui ne l’avait pas accepté en son sein comme elle l’aurait dû, sans doute. Mais, après tout, nous avons alors gagné un autre Édouard, qui s’est investi dans d’autres secteurs d’activité et dans d’autres passions. Jamais loin de l’éducation, finalement…
Le journaliste Édouard Boeglin ne faisait-il pas œuvre d’éducateur, des Dernières Nouvelles d’Alsace à l’Alsace-Le pays, dont il a été le secrétaire général de la rédaction jusqu’à son départ en retraite ? Que dire aussi de l’organisateur inlassable à partir de 1989 des colloques internationaux des bicentenaires de Mulhouse, rencontres célébrant le bicentenaire de la Révolution française (1789) et le bicentenaire du rattachement de Mulhouse à la France (1798) ? Au fil des années, il a fait venir à Mulhouse de nombreux universitaires, chercheurs, journalistes, français et étrangers, pour travailler en commun sur les grands problèmes de notre époque : République, sciences, etc. Il avait tenu à associer l’OURS à ces travaux, intégrant Claude Fuzier dans le comité scientifique. Ces colloques ont été publiés en ouvrages et, quand les finances ont manqué, nous avions consacré en 1993 notre Cahier-Revue n° 213 à la publication des actes du Symposium consacré à « La liberté, pivot de la République ».
Les ouvrages personnels d’Édouard lui ont aussi permis de faire œuvre d’éducateur. De transmetteur également… Car Édouard, avec sa générosité sans faille, savait et aimait transmettre. Avec ses livres, il est revenu sur les rapports entre les anarchistes et les francs-maçons (Anarchistes, francs-maçons et autres combattants de la liberté, Bruno Leprince, 1998 et 2001), a fait connaître au plus grand nombre la vie et l’action des grandes personnalités de sa région (Edgar, Jean-Pierre et les autres, Cêtre, Besançon, 1988), mais aussi les grands événements du monde, en reprenant en livre certaines de ses chroniques parues dans son journal (De Charles Martel à Charles de Gaulle. Ils ont écrit notre histoire, Via Cadet, 2001). On signalera aussi Les Marianne de la République en Franche-Comté (avec une préface de Maurice Agulhon) où il a démontré sa grande connaissance de cette région, mais aussi son regard sur une République qu’il entendait toujours défendre, et faire progresser. On aurait garde d’oublier son ouvrage La tête haute, paru en 1983, dans lequel il est revenu sur 20 années de sa vie politique (il avait rejoint la SFIO en 1962), évoquant son départ du Parti socialiste et son engagement dans d’autres voies lui qui, alors, disait de lui qu’il n’était « plus que citoyen de l’ancienne république libre de Mulhouse ». C’est en effet en 1976 qu’il a quitté le Parti socialiste dans lequel il ne se sentait plus à l’aise (rejetant le présidentialisme rampant et ses conséquences sur la vie du Parti) après y avoir exercé des postes de responsabilité localement (secrétaire de la fédération du Haut-Rhin de 1969 à 1974) et nationalement (membre du comité directeur de 1973 à 1975). Il a un temps rejoint le Mouvement des radicaux de gauche puis les différentes structures animées par Jean-Pierre Chevènement, animé par la fidélité à certains idéaux.
Édouard était aussi un communicant hors pair. C’était sans doute lié à sa profession de journalise, qui impose la nécessité de communiquer en concentrant sa pensée, mais aussi la régularité, sans pouvoir reporter toujours… sinon le journal ne sortirait jamais ! Ce sens de la synthèse, de la communication, il l’a aussi mis au service de la Franc-maçonnerie du Grand Orient de France, entre Mulhouse, Colmar et Paris. Il a rejoint en 1972 le Grand Orient de France. Au fil de son parcours maçonnique, il a participé à la création de quelques loges (à Paris ou en Alsace) et s’est affilié à quelques autres. Surtout, il a siégé au Conseil de l’Ordre du GODF à deux reprises : 1998-1999, 2000-2003 (grand maître adjoint de 2001 à 2003). Au sein de cet organisme, le communicant qu’il était s’est attelé à la question des publications du Grand Orient de France. Dans la foulée, ayant compris l’importance maintenue de l’écrit, même face à Internet, surtout dans le domaine du poche, il a lancé avec audace des collections d’ouvrages qui ont vite occupé les étals des libraires : plusieurs dizaines de livres publiés entre 1998 et 2003, qui ont réinstallé le Grand Orient de France dans le domaine de la production éditoriale, pour donner aussi un corpus philosophique et historique à ses membres. Avec audace, Édouard a initié ce projet…
Quelques mots enfin sur son engagement sans faille, au-delà de l’appartenance partisane, dans la vie de la Cité, à Mulhouse et en Alsace. Il le faisait par fidélité à quelques amis, et aussi pour transmettre quelques idées auxquelles il croyait… Peu lui importait que ses campagnes électorales recueillent l’adhésion de quelques dizaines ou quelques centaines d’électeurs. Conseiller municipal délégué de Mulhouse, chargé du patrimoine, dans l’équipe de Jean-Marie Bockel, il a mené ces dernières années une action déterminée pour faire connaître les richesses historiques de sa commune (remportant il y a quelques mois encore une grande victoire en faisant obtenir à cette ville le label de ville d’art et d’histoire), ne négligeant pas pour autant les grands enjeux politiques de cette histoire locale, contribuant à réinstaller dans Mulhouse le nom d’Alfred Dreyfus.
Quelques mots bien sûr sur Édouard et l’OURS, qu’il avait rejoint en 1970, pratiquement dès la création de notre Office, donc. Il y est venu sur des bases politiques, dans la lignée du combat initié par Guy Mollet dans la SFIO à partir de 1963, qui s’est poursuivi en 1969 (disparition de la SFIO et création du Parti socialiste) et après. S’il a rarement écrit dans nos publications(1), il a toujours suivi au plus près nos activités, notamment pendant deux périodes délicates à vivre pour l’OURS : le décès de Claude Fuzier en 1997, et celui de Pierre Guidoni en 2000, exerçant la présidence par intérim de l’Office, se présentant alors comme le « Poher de l’OURS », car il ne manquait jamais d’humour.
Nous sommes désormais confrontés à nos souvenirs, aux moments qu’Édouard nous a offerts, car cet homme généreux nous a offert beaucoup. Moments de débats, travaux de table, promenades dans les rues de Mulhouse ou de Paris. Moments heureux.
Denis Lefebvre
(1) On notera en juin 1999 son article dans recherche socialiste n°7, pour le 30e anniversaire de l’OURS.
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