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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE |
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BERGOUNIOUX/BACHELAY-MAYER-ROSSIGNOL/LOURS 396
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DIX ORIENTATIONS POUR LES SOCIALISTES Par Alain BERGOUNIOUX
A propos de : Guillaume Bachelay, Nicolas Mayer-Rossignol, La Gauche après la crise, Jean-Claude Gawsewitch, 2010, 254 p,17,90 €
Article paru dans L’OURS, mensuel de critique littéraire, culturelle, artistique, n°396, mars 2010, p. 4
Ce livre est publié dans une collection qui s’intitule « coup de gueule ». Et, il est vrai qu’il porte une colère contre toutes celles et tous ceux qui font rapidement leur deuil (médiatique le plus souvent) du Parti socialiste et parfois de l’idée même de socialisme.
L’ouvrage comporte sa part de « piques » contre des personnalités socialistes actuelles, Ségolène Royal, Manuel Valls, François Rebsamen ou Vincent Peillon. Guillaume Bachelay et Nicolas Mayer-Rossignol sont des combattants. Ils affichent leur engagement au sein des confrontations du Parti socialiste. Ils manifestent leur attachement à Laurent Fabius et leur soutien à Martine Aubry.
Une crise qui vient de loin Mais, on aurait tort de s’en arrêter là. Car les deux auteurs entreprennent un vrai travail de reconstruction doctrinal et politique. Il le font en essayant de voir les raisons profondes qui, sinon expliquent (car la part d’« accidents », c’est-à-dire des erreurs politiques, qu’ils écartent trop rapidement, a joué tout son rôle dans les défaites socialistes de 2002 et de 2007), du moins rendent compte des difficultés socialistes présentes en France, mais aussi en Europe. Ils les voient dans la « dérive du continent social-démocrate » qui a trop concédé au néo-libéralisme dans les années 1990-2000, même si les auteurs notent que le Parti socialiste français et le gouvernement de Lionel Jospin de 1997 à 2002 n’ont pas mené une politique de « troisième voie ». C’est que plus profondément les évolutions survenues, depuis les années 1980, avec la mondialisation libérale, la transformation de nos sociétés, l’individualisation n’en étant que le symptôme le plus évident, ont sapé les bases de ce qu’ont été les « compromis nationaux » du socialisme européen.
La crise politique a été aussi idéologique. Ce sont les fondements d’une conception du progrès – partagée par tous les socialistes européens, quelles que soient leurs différences – qui sont en cause, la confiance dans la technique et la science, qui a sous-tendu (et fait accepter le mode de production productiviste du capitalisme), et la sécularisation laïque, qui faute de recherche d’une ambition spirituelle, laisse nos sociétés en panne de sens et susceptibles de connaître de nouvelles dérives. Bref, sortir de la crise socialiste suppose de refonder l’humanisme qui est le terreau du socialisme.
Comment ? En faisant, d’abord, la clarté sur ce que doit être le socialisme du XXIe siècle. Les auteurs parlent d’un « socialisme postlibéral » – tout en concédant en note, qu’il s’agit plus exactement, d’un socialisme « postnéo-libéral », car ils ne nient pas que le socialisme quant il est démocratique évidemment est aussi l’héritier du libéralisme. Un tel socialisme doit donc dépasser « la gauche correctrice » des années 1990-2000, ne pas confondre la défense de l’individu et l’individualisme, promouvoir un écosystème qui s’inscrive clairement dans une bataille pour le développement, ne pas faire du réformisme – qui demeure la méthode revendiquée – un simple accompagnement du libéralisme.
Dix orientations concrètes La troisième partie du livre présente dix orientations plus concrètes déduites de ce diagnostic. Elles sont diverses puisqu’elles vont d’une « révolution fiscale » à un « gouvernement mondial », en passant par la suppression des grandes écoles, le passage aux 35 heures, une aide conditionnée aux PME, une rénovation des services publics etc… Il est à noter dans ces développements que, presque tous, reposent sur l’action de la puissance publique. Cette valorisation de l’État – dont l’importance a été rappelée dans et par la crise actuelle du capitalisme – ne conduit pas nos auteurs cependant à s’interroger sur ce que peut faire également la société, comment construire des partenariats qui paraissent pourtant indispensables compte tenu de la « paupérisation relative » des États aujourd’hui. Cela amène d’ailleurs, nos deux auteurs, derrière les titres entraînant de ces dix chapitres, à esquisser des démarches plus prudentes : ainsi « vers les 32 heures », certes, mais un fois les comptes publics rétablis, et l’appareil productif consolidé et avec une démarche « graduelle et expérimentale »
Le livre s’achève par un retour au politique. Prenant acte des caractères de notre « démocratie d’opinion », dont Guillaume Bachelay et Nicolas Mayer-Rossignol voient bien les défauts et qu’ils n’aiment pas, les propositions finales posent les problèmes stratégiques qui sont devant le Parti socialiste à court terme : réussir les élections primaires pour élire le meilleur candidat possible, rénover les pratiques partisanes, sans rêver à un impossible parti de masses, penser un parti ouvert, renouvelé dans ses élites, s’appuyant sur des réseaux sociaux, travailler à concrétiser une « confédération de la gauche » capable de s’unir autour d’un contrat commun de gouvernement et d’un accord législatif. Cela laisse quelques questions en suspens pour les socialistes, la place de leur projet propre, l’acceptation d’un éventuel candidat qui ne sorte pas de leurs rangs aux élections primaires ? Bien des débats en perspectives (et qu’il va falloir vite trancher). Ce livre permet en tout cas de bien poser les problèmes et il fait preuve d’une authentique ambition pour les socialistes d’aujourd’hui et de demain.
Alain Bergounioux
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