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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE
 
CEPEDE/BERGOUNIOUX/LOURS 396
Les socialistes, histoire rose et rosse
Par Frédéric CEPEDE

A propos de :
Alain Bergounioux, Les socialistes, Le cavalier bleu/idées reçues, 2010, 127 p, 9,8 €

Article paru dans L’OURS, mensuel de critique littéraire, culturelle, artistique, n°396, mars 2010, p. 5

Dans une collection qui examine les idées reçues sur toute une variété d’« objets », Alain Bergounioux propose une série de réponses à ces idées simples qui courent sur les socialistes, pour mieux les connaître, et les critiquer, si besoin est, mais en toute connaissance de cause.

On l’a compris, ce type d’ouvrage répond à des impératifs éditoriaux stricts : questions intrigantes, voire provocantes, pour autant de courts articles destinés à piquer la curiosité et nourrir la réflexion du lecteur. Les socialistes dont il est question ici sont ceux qui s’engagèrent principalement dans le Parti qui se réclame du socialisme. Le fil conducteur, la question du pouvoir, de sa conquête, de son exercice, n’étonnera pas.

Une histoire longue
Alain Bergounioux a donc retenu 19 idées reçues sur les socialistes qu’il a classées en trois parties. La première regroupe celles concernant l’histoire du socialisme, où il discute l’origine d’un « socialisme né de la révolution industrielle », étudie la place de « Jaurès [qui] a fondé le socialisme français », le « congrès de Tours [qui] a été le tournant de l’histoire du socialisme français », et le « Front populaire [qui] a transformé la société française ». Il tord le cou à l’idée qui court encore parfois que « les socialistes n’ont pas été résistants ». Pour clore cette partie, il s’attaque de front à la question de Guy Mollet « fossoyeur du socialisme ». En historien, il contextualise, met sur la table les pièces du dossier. Le congrès de 1946 (et « la rénovation manquée »), l’Algérie, Suez, mai 1958 s’inscrivent à des degrés divers au passif, tempéré ici par une prise en compte de ce qui lui revient en propre et de ce qui relève du collectif, des contraintes de la position du secrétaire général de la SFIO, et notamment celle d’éviter en 1958 la « guerre civile ». En regard, l’Europe, le social, la fidélité au parti pèsent peu. Mais, le terme de « fossoyeur » engage sur un terrain d’histoire culturelle qu’Alain Bergounioux n’emprunte pas ici, et qui mériterait aussi débat, autant que les usages des termes « molletiste », « molletisme » ou « antimolletisme » (avec un ou deux t ?). De même, le Mollet de la fin des années 60 est-il celui de 1946-1958 ? Les leçons qu’il tire de l’exercice du pouvoir sont-elles disqualifiées par son passif ? Que ces questions n’aient pas préoccupé ses contemporains, on le constate et on peut le comprendre, mais elles intéressent les historiens.

Mais là n’est sans doute pas l’essentiel pour Alain Bergounioux. La seconde partie engage « le Parti socialiste aujourd’hui ». On le constate, les « idées reçues » retenues importent moins que ce qu’elles permettent de développements sur ce qu’est devenu ce parti depuis Épinay : « le parti socialiste moderne a été créé par François Mitterrand », qui a écarté « Mendès France et Rocard », dans un parti « de fonctionnaires » où « les courants n’arrivent pas s’entendre » et, d’ailleurs, les socialistes, au pouvoir, n’ont « pas tenu leurs engagements ». Ils se retrouvent désormais « sans leader depuis le départ de Lionel Jospin », et « ne gagnent plus que les élections locales », car « entre Besancenot et Bayrou, les socialistes ne savent plus où donner de la tête ». Alain Bergounioux corrige, redresse, nuance ce portrait de groupe, le resitue dans l’histoire longue, mais il ne masque pas les difficultés actuelles de ligne politique et de leader.

Quels idées pour quel parti ?
Le dernière partie sur « les idées socialistes » questionne, sans ignorer les représentations des socialistes eux-mêmes, leurs rapports à la gestion (« ils savent désormais gérer, et dans la durée »), à l’Europe (« ils ne sont pas béats, mais exigeants »), à la sécurité (« ils s’en préoccupent, sans laxisme, depuis longtemps »), et leurs réponses aux défis de la mondialisation. Un tour d’horizon informé et stimulant.

Son ultime réflexion sur « l’absence de projet des socialistes » retient particulièrement l’attention, tant elle semble nourrie de sa propre expérience de « porte plume » des récents projets des socialistes, et de la Déclaration de principes de 2008… qui les engagent collectivement. Que les dirigeants du PS eux mêmes puissent alimenter cette « idée reçue », ne peut être séparé des réflexions semées par Alain Bergounioux dans plusieurs articles sur la nature du Parti en 2010, sur celui ou celle qui dans notre démocratie actuelle peut l’incarner, et sur ce qu’il a à proposer au pays. S’il défend encore l’outil « parti », il ne semble plus très sûr qu’à l’échelle des ambitions individuelles et de la compétition qui va s’ouvrir, son point de vue soit largement partagé. Mais, en historien, il décrit les alternatives. Un diagnostic particulièrement utile pour les temps qui viennent.

Frédéric Cépède
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