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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE |
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JL Panné : Bellevilloise 316
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LA “BELLE” DE BELLEVILLE par JEAN-LOUIS PANNE a/s de Jean-Jacques Meusy (dir) La Bellevilloise (1877-1939). Une page d’histoire de la coopération et du mouvement ouvrier français Créaphis 2001 239 p 30 e
La Bellevilloise, la " Belle " de Belleville. Le quartier populaire, la coopérative, son siège de la rue Boyer, toujours là, avec à ses frontons le diptyque : " Science, Travail " et la faucille accompagnée de l’indispensable marteau. Cette institution populaire a non seulement laissé sa marque dans le paysage urbain, mais aussi dans la mémoire des nombreux militants qui eurent l’occasion de s’y rendre pour participer à des assemblées syndicales, politiques ou coopératives. Un bel album illustré nous fait revivre son aventure.
Je me souviens de Marius Giraud parlant des travaux qui y furent effectués dans les années trente, ce qui permit l’embauche de Raymond Péricat alors dans une mauvaise passe - Péricat fondateur du tout premier Parti communiste en 1919, de tendance anarcho-communiste. Fondée par 20 ouvriers dont 18 d’une même société, la Bellevilloise fait écho à l’idée d’association qui avait animé tant de militants du Second Empire. Elle est donc un " lieu de mémoire ", un lieu complexe où se sont noués, à son échelle, les espérances, les conflits entre courants du mouvement ouvrier, les affrontements entre constructeurs patients d’un outil d’amélioration de la condition ouvrière et révolutionnaires aux conceptions plutôt utilitaristes. Bref, son histoire témoigne du débat entre réforme et révolution. Les contributions qui portent sur l’entre-deux-guerres en rendent compte. L’ouvrage dans son ensemble présente l’aventure de la Bellevilloise par période. La première de sa fondation en 1877 à la veille de la guerre de 1914 avec la réédition de la brochure de Louis Héliès (1912), présentée et annotée par Christiane Demeulenaere-Douyère qui nous fournit les éléments permettant de resituer son histoire en symbiose avec celle du mouvement ouvrier, un mouvement qui se reconstitue après la répression de la Commune. Vient ensuite la période de la Grande Guerre, époque où la Bellevilloise " fait encore largement figure de modèle " (J.-L. Robert), mais où les signes de son déclin apparaissent déjà par comparaison avec l’ensemble du mouvement ccopératif de la région parisienne. Enfin, les années 1920 sont marquées par les affrontements entre socialistes et communistes. Avec la crise, les difficultés de la Bellevilloise jusque-là plus ou moins masquées éclatent au grand jour. En mai 1936, elle disparaît. Des activités initiées dans son cadre ont perduré ensuite et cette " institution " populaire qui touchait à tous les domaines d’activités sociales (le patronage laïque pour les enfants et les adolescents, l’université populaire " La Semaille ", le sport ouvrier, le cinéma avec le groupe Spartacus, la musique et même l’espéranto) a laissé des souvenirs forts à ceux et celles qui y participèrent. Les contributions centrées sur l’entre-deux-guerres accordent une place quelque peu majorée à la présentation des positions communistes en matière de coopération. Etait-il si nécessaire de nous infliger les chiffres de propagande sur le nombre de coopérateurs en URSS - chiffres au demeurant dont on sait ce qu’il faut en penser (du moins le devrait-on) - au détriment d’une analyse sans concession de l’attitude adoptée par les dirigeants communistes et de ce qu’elle nous enseigne sur les pratiques politiques communistes (on fait crier " Vive les Soviets " aux enfants qui ne comprennent vraisemblablement pas la signification de ce slogan, comme le fait remarquer un ancien mutin de la mer Noire). D’ailleurs, J.-J. Meusy (1) livre beaucoup d’information mais semble avoir à cœur de minimiser les responsabilités des dirigeants communistes. Il explique pourtant (en note) que la dirigeante du IIe Rayon dont dépend la coopérative " gère " de l’extérieur les questions de personnel exclusivement en fonctions de critères politiques. L’interventionnisme constant au tournant des années 1930, caractéristique d’une " politique sectaire " (dixit J.-J. Meusy), ne fut sans doute pas étrangère à la chute du nombre des adhérents. Louis Sellier, ancien secrétaire de la SFIC, et ses amis qui se retrouvèrent pris dans les affaires de la Banque ouvrière et paysanne fondé par la SFIC en 1925, avaient expliqué alors que " l’autorité des Conseils d’administration [des coopératives] a été de plus en plus contrebalancée, puis dépassée, puis bafouée par les ‘fractions communistes’ d’un certain personnel, introduites là comme des rongeurs dans une meule de blé ". Une fois le destin de la Bellevilloise lié à celui de la Banque ouvrière et paysanne - la première étant actionnaire de la seconde, et la seconde accordant des prêts à la première - comme le montre fort bien J.-J. Meusy, toute situation de crise ne pouvait que s’amplifier par une sorte d’effet de réciprocité. La décision prise à l’automne 1929 de faire prendre en gérance les coopératives de l’Association régionale des coopératives ouvrières (ARCO) créée en 1926 par la BOP (donc la SFIC) fut lourde de conséquences ; le gouvernement cherchant à se débarrasser de la BOP (qui gère les créances de L’Humanité), la Bellevilloise se trouva ipso facto entraînée dans la tourmente… Loin d’être une cause unique de la fermeture de la coopérative, l’affaire de la BOP a été pour beaucoup dans cette disparition à la veille du grand mouvement de grève de mai-juin 1936. La grande richesse de ce volume est une incitation à la réflexion. Il devrait inspirer des recherches croisant à la fois la dimension humaine de telles entreprises (l’aspect social et humain dans un champ défini tel qu’un quartier populaire où les traditions politiques sont à la fois anciennes et fortes) et leur dimension idéologique, domaine qu’investissent les appareils politiques, pour le meilleur… et le pire. Jean-Louis Panné 1. On s’étonne par contre du qualificatif de " trotskiste " (note 60, p. 8) qu’il accole au journal Le Cri du Peuple, en réalité hebdomadaire syndicaliste-révolutionnaire, émanation du Comité pour l’indépendance du syndicalisme, créé en 1930 par les militants regroupés autour de Pierre Monatte et Maurice Chambelland qui était responsable de sa gestion.
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