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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE |
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Braud/Europe L'OURS 340
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PENSER L’EUROPE DE DEMAIN par Maurice Braud
à propos de : Élisabeth Guigou Je vous parle d’Europe Seuil 2004 329 p 18 e
Pierre Moscovici Les 10 questions qui fâchent les Européens Perrin 2004 238 p 18 e
Deux anciens ministres (socialistes) des Affaires européennes nous livrent leurs analyses et leur propositions pour l’Europe. À lire pour préparer sérieusement les débats sur la Constitution européenne à la rentrée.
Les deux ouvrages sont très différents. Partant d’une lecture de l’histoire de la construction européenne, avec une focalisation forte sur la période où François Mitterrand, président de la République, a contribué à relancer la construction européenne, Élisabeth Guigou tente d’apporter des éléments de réponse aux défis d’aujourd’hui. Pierre Moscovici part, lui, de l’apparente désaffection de nos concitoyens pour le projet européen, et revient sur les différents points qui lui semblent essentiels. Le but d’Élisabeth Guigou n’est pas de faire l’histoire d’un projet mais d’évaluer l’actualité de la démarche des fondateurs et de celles et ceux qui s’illustrèrent dans la mise en place des premières Communautés. En passant, et c’est un des moments passionnants de l’ouvrage, il y a l’évocation de la relance des années 1980-1990, vue par une proche conseillère puis ministre de François Mitterrand : Fontainebleau, Acte unique, Objectif 92, Union économique et monétaire (UEM). Dans cette évocation historique, le rôle et l’action de Guy Mollet et de son gouvernement sont justement évoqués, en particulier dans les phases préparatoires aux Traités de Rome. Mais si le nom du radical Maurice Faure est indiqué à juste titre, pourquoi ne pas citer le ministre (socialiste) des Affaires étrangères Christian Pineau, plus actif et résolu sur le dossier européen que Pierre Mendès France, cité à de nombreuses reprises ? Concernant les discussions au sein de la conférence intergouvernementale sur l’UEM, Élisabeth Guigou rappelle que la politique de change de ce qui est aujourd’hui l’euro et la politique économique stricto sensu sont de la responsabilité du Conseil de l’UE (en formation « ecofin ») et du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement, pas de la décision de la BCE ou de la Commission. Et elle ajoute : « Hélas, vainqueurs sur le papier, nous allions, les années suivantes, capituler. »
Reprendre l’initiative L’absence – par la carence du Conseil de l’UE et du Conseil européen – d’une véritable politique économique européenne au sens plein du terme est à l’origine d’un déséquilibre profond de la construction européenne telle qu’elle se met en place et est susceptible de compromettre à terme des réalisations aussi essentielles que notre monnaie commune. Consciente des lacunes actuelles de la construction communautaire, Élisabeth Guigou appelle à un nouvel élan pour l’Europe, en particulier dans le domaine économique, mais aussi pour la citoyenneté, la politique étrangère et de défense dans un jeu de forces à l’échelon mondial où l’Europe doit se donner les moyens d’un rôle de premier plan. L’élargissement de l’UE aux pays d’Europe centrale et orientale est de ce point de vue un atout, et le développement de la coopération avec les pays de la rive sud de la Méditerranée une nécessité. Pierre Moscovici consacre un chapitre entier aux frontières de l’Union : pour l’entrée de la Suisse si tant est que les citoyens de cette dernière le veuillent jamais, contre l’entrée dans l’UE d’une Russie dont le caractère européen ne fait pas de doute, pour l’entrée de la Turquie conditionnée au respect des « critères de Copenhague », contre l’adhésion des pays du Maghreb mais en donnant plus de contenus et de moyens à la coopération euro-méditerranéenne. L’adoption d’une Constitution de l’Union est aujourd’hui une étape nécessaire pour nos deux auteurs. L’un et l’autre relèvent le travail effectué par la Convention européenne de 2002-2003, même s’ils en pointent les insuffisances, notamment dans le domaine social. Pierre Moscovici, appliquant aux questions européennes ce qu’il appelle un « réformisme radical », rejette la posture de ceux qui refusent l’Europe qui existe au nom d’une Europe idéale : la construction européenne est l’histoire réussie d’une politique tenace de petits pas quotidiens plus que d’architectures idéales et brillantes, de la force de la conviction patiente plus que de l’emportement sans lendemain. Aussi nous suggère-t-il de « continuer le combat », en particulier après l’élection du Parlement européen de juin 2004. Nous y sommes. Nos concitoyens de l’UE ont largement boudé ce scrutin, n’en percevant pas l’enjeu, n’en comprenant pas l’importance, persuadés peut-être aussi que la politique n’est pas ou n’est plus la discipline, l’art ou la science qui régit nos destins. Ces deux ouvrages contribuent à ouvrir le débat sur notre futur proche, dans le temps et dans l’espace. En remettant les événements et les questions en perspective, en donnant un « sens », une orientation aux choses à des citoyens déboussolés, ils « font » pleinement de la politique, parce qu’ils s’inscrivent dans un projet parti d’hier, à poursuivre aujourd’hui et à réaliser demain.
Maurice Braud |
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