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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE |
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L'éducation de la Jeunesse
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L’ÉDUCATION DE LA JEUNESSE
Avant de lire son rapport, Strago indique qu’il a évité de faire des considérations théoriques.
RAPPORT SUR L’EDUCATION DE LA JEUNESSE SOCIALISTE “ Une des actions les plus importantes de notre organisation, est certainement celle de l’éducation de la jeunesse ouvrière. Il semble même, parfois, que c’est une raison principale de son existence. Et si le mouvement d’organisation de la Jeunesse socialiste dans notre pays, a eu une telle instabilité, c’est que nos groupes n’ont pas toujours su garder et intéresser la jeunesse prolétarienne venue à eux.
La conférence de l’Internationale jeunesse socialiste, à Stuttgart, sur le rapport du camarade Roland Holst, a tracé un programme sur l’éducation socialiste de la jeunesse ouvrière. C’est dans les limites de ses conclusions, appliquées aux conditions de notre pays, que je veux traiter la question. La première chose qui frappe dans l’éducation, telle qu’elle se fait actuellement dans nos groupes, c’est le manque de méthode et de plan. L’éducation d’un groupe sera d’autant plus fructueuse, qu’au commencement de l’année, il sera tracé un programme très élastique de ses soirées, et que ses conférences et cours constitueront un ensemble bien ordonné. Le rôle de l’éducation ne doit pas être seulement d’augmenter la quantité de savoir de notre jeune camarade, de faire de son cerveau un collecteur de science, mais de développer chez lui la volonté d’étudier, de penser et de réfléchir. Ce qui est important, dans l’éducation, c’est d’abord le choix du sujet, ensuite et surtout le choix des conférences et des orateurs. Il ne faut pas seulement que le conférencier connaisse son sujet par cœur, et vienne le débiter d’une voix monotone, en phonographe, si vous voulez, il faut surtout qu’il étudie son sujet avec l’auditoire, qu’il lui indique les sources et les documents dont la connaissance lui sera nécessaire.
Éducation centralisée Avant d’entrer dans les détails de l’éducation organisée par le groupe lui-même, j’étudierai le fonctionnement de ce que j’appellerai l’éducation centralisée. Le seul intermédiaire dans l’état actuel des choses qui puisse exister entre le groupe et l’organisme central, c’est le journal. La propagande et l’éducation qu’il doit faire auprès de la Jeunesse, sont des questions trop délicates pour ne pas les envisager très sérieusement. La rédaction doit en être en même temps instructive, intéressante, et facilement accessible à la masse. C’est peut-être là le problème le plus difficile à résoudre, car il ne suffit pas seulement d’avoir de solides convictions socialistes, mais il faut surtout une longue expérience. Je vous proposerai, en conséquence, que la rédaction soit confiée à un Comité central d’éducation composé non seulement de jeunes, mais aussi, et surtout d’aînés, qui par leur longue expérience, leur travail ou leur position sociale, pourront nous être utiles. Ce comité nommé par le Comité national des Jeunesses sera sous son contrôle, et sous celui de la CAP. Son rôle sera : 1) de créer des tribunes et rubriques éducatives et scientifiques dans le journal. 2° d’indiquer aux ententes régionales et aux groupes l’éducation qu’ils pourront faire. 3) de créer ou de se mettre en rapport avec les écoles socialistes.
Le travail de ce comité, bien composé, peut-être considérable, et son utilité énorme. Voilà, pour moi, la seule éducation centralisée efficace qui soit possible pour le moment. Et maintenant, passons aux moyens particuliers d’éducation.
Cours Les premiers que préconise la conférence de Stuttgart sont les cours que je diviserais en deux parties : a) les cours de sciences sociales et d’économie politique b) les cours sur les autres matières Pour la première partie, comme l’indique le rapport de Roland-Holst la nécessité qu’il y a pour la jeunesse de connaître la science de la société, explique la création de ces cours. Cette éducation peut-être mieux faite dans les écoles socialistes, créées d’accord avec les organisations socialistes et ouvrières de la localité, dont le rôle sera de donner un enseignement sérieux à la jeunesse ouvrière, sur le socialisme, la lutte de classe, la situation économique du prolétariat, les organisations ouvrières, l’histoire des révolutions, etc… Ces écoles devront avoir des relations étroites avec le Comité d’éducation. Quant à la deuxième partie, il est indispensable qu’à côté de connaissances sur l’économie politique, la jeunesse ouvrière ait aussi une culture générale, sous le rapport des langues vivantes et de la science. La création de ces cours par les Jeunesses serait nécessaire, mais ce serait se leurrer inutilement, et ne pas voir que, le plus souvent, les groupes n’ont pas assez de force et d’éléments pour la tenter. Aussi je vous propose la création de bureaux de renseignements sur les cours postscolaires qui ont lieu dans la localité, car au fond, il n’y a pas une façon bourgeoise ou socialiste d’apprendre l’anglais ou la physique. Le rôle de ces bureaux sera d’indiquer aux camarades le lieu et les heures de ces cours et de les renseigner sur leur valeur et leur intérêt. Et ainsi ces bureaux pourront rendre à la jeunesse d’immense services surtout dans les localités ou il y a des municipalités socialistes, et ou d’accord avec celles-ci, ils pourront créer un enseignement post scolaire très intéressants.
Conférences et éducation dans l’intérieur du groupe Tout ce qui a été traité jusqu’à présent, concerne l’éducation faite sous le contrôle direct du groupe, mais en dehors de lui. Il y a maintenant une éducation qui doit être faite dans son sein, et qui a bien son importance. Elle doit différer de la précédente, en ce sens que non seulement elle augmente le savoir du camarade, mais surtout elle l’habitue à l’organisation, à la discussion, lui apprend à soutenir son point de vue, et fait de lui en un mot, un militant conscient. Pour arriver à ce but, les groupes devront organiser des soirées d’études et de discussion entre camarades, discussions qui devront, autant que possible, être à leur portée, de façon à les intéresser et à les engager à y prendre part. Parmi d’autres moyens, je signalerai celui de la semaine, quinzaine ou mois politique, et qui consiste en ceci : Chaque camarade à tour de rôle est chargé de faire un compte-rendu des événements politiques et économiques qui se sont déroulés pendant la semaine, la quinzaine ou le mois. Il en souligne les faits les plus importants, les commente, et donne son avis, ce qui a l’avantage de chasser la timidité des camarades qui n’osent pas prendre la parole, et de provoquer une discussion dans laquelle des échanges de vue très intéressants peuvent être faits. Le groupe discutera aussi les questions d’ordre social ou d’économie politique, qui paraîtront dans le journal, sous les auspices du Comité central d’éducation, lequel devra faire publier des discussions sérieuses sur les questions. A côte de chacune des besognes les plus importantes du groupe, doit être l’initiation de ses membres aux besoins des organisations. Il devra organiser des causeries sur la façon de remplir un secrétariat, de tenir la comptabilité d’un groupe ; d’administrer une coopérative, en ayant soin de faire suivre les causeries de travaux pratiques. Ceci est très important pour donner aux organisations des initiés qui leur font défaut trop souvent.
Bibliothèques et salles de lecture L’utilité d’une bonne bibliothèque dans un groupe est indiscutable, mais les groupes n’ont pas en général les moyens matériels, pour pouvoir fonder et alimenter une bibliothèque sérieuse. Aussi cette besogne sera profitable seulement, si elle est faite en commun avec la section locale (au service de tous les membres du Parti de la localité). Mais ici apparaît une question très délicate : c’est le choix des livres. Je voudrais attirer votre attention sur la nécessité de lutter énergiquement contre la littérature malsaine : publication à treize sous, aventures de détectives Buffalo Bill, Nick Carter et autres Arsènes lupins, romans des journaux à grand tirage, etc… car nous devons constater, à notre grand regret, qu’elles sont répandues par la jeunesse ouvrière, et surtout parmi les jeunes filles. Dans tous les pays, les organisations de la Jeunesse socialiste, mènent une lutte ardente contre ce fléau, qui ne fait qu’exciter chez la jeunesse les pires passions, en lui tournant la tête, avec des héros assassins ou policiers, ou avec des princes romanesques. Relativement à la littérature socialiste, nous devons d’abord soutenir et développer la richesse de la librairie de notre parti, en la favorisant toujours, et en nous intéressant à toues ses publications. Quant à la littérature proprement dite, le Comité d’éducation indiquera au fur et à mesure, les livres utiles ou nuisibles, et il donnera régulièrement un résumé des livres parus intéressants la jeunesse ouvrière. Maintenant se pose la question des salles de lecture, que les groupes devraient envisager très sérieusement. Il n’y a rien qui puisse aussi bien attirer la jeunesse, et créer entre ses membres des relations amicales. Ces maisons sont très répandues à l’étranger, particulièrement en Allemagne, sous le nom ” die Jugendshsime ”. On y trouve à côté des salles de lecture et des bibliothèques, des salles de jeu et de réunion et rien n’est plus beau que de voir ces jeunes aux échecs, aux cartes, au jaquet, etc… C’est en outre un des moyens les plus efficaces à employer parmi la jeunesse, pour lutter contre l’alcoolisme. Quant à la question des bibliothèques ambulantes, le Comité national fera tout son possible pour qu’elles soient organisées par le Parti.
Visites et conférences Une tâche qui revient tout spécialement aux ententes régionales, c’est celle d’organiser des visites et des excursions. Une visite à cette supériorité sur une conférence, en ce qu’elle intéresse l’œil, en même temps qu’elle instruit. Elle soumet au visiteur des documents vivants. Le nombre des choses à visiter est énorme, mais j’attire votre attention particulièrment sur les visites artistiques et industrielles. Les premières ont l’avantage de développer le goût artistique ; ce sont les visites aux musées, aux expositions, monuments, etc. Quant aux secondes, elles sont aussi d’une haute importance ; elles permettent de démontrer la puissance du travail, et surtout du travail collectif. Les visites les plus recommandables sont celles des grandes usines, des grands magasins, des grands services publics, c’est-à-dire, les grands rouages capitalistes, où l’on peut voir comment les petites roues forment une grande horloge, où tout à sa place et sa position. Et plus le service est grand, plus il y a d’ordre et d’économie, ce qui prouve les grands avantages de la production collective. Dans les milieux paysans, visiter les machines et outils agricoles en ayant soin de démontrer leur perfectionnement et leur utilité grandissante. Quant aux excursions, il y a lieu de les diviser, en excursions dans les autres villes et excursions à la campagne. Les excursions dans les autres villes ont l’avantage de développer la camaraderie, de créer la sympathie entre camarades d’une même localité. On dit les voyages forment la jeunesse aussi est-il nécessaire qu’une entente préalable existe entre les groupes, et que les visites d’un groupe à l’autre, soient organisées le plus souvent possible. Quant aux excursions à la campagne, elles doivent servir plus à la distraction qu’à l’éducation. Cela ne veut pas dire de dédaigner, lorsque l’occasion s’en présente, une petite causerie intéressante sur l’histoire naturelle, ou un petit concert entre camarades. Mais à côté de cela, ce qu’elles doivent favoriser surtout, ce sont les jeux en plein air, et je laisse à mon ami Rebillat, spécialiste dans la question, le soin de nous la développer abondamment. ”
Après interventions de Levy et de Catulle Cambier, la conférence approuve le rapport.
Les jeux et les exercices physiques Rebillat lit son rapport ainsi conçu : “ Le comité national des Jeunesses socialistes a indiqué, parmi les moyens à employer pour le recrutement et l’éducation de la jeunesse, les jeux, et les exercices physiques. Il est indéniable qu’il est de toute nécessité, surtout pour les citadins, de combattre les efforts pernicieux pour la santé, du séjour dans les ateliers et bureaux . Ces conditions hygiéniques défectueuses qui sévissent dans le milieu actuel, rendent nécessaire un antidote : c’est l’exercice physique dans un milieu sain, dans un atmosphère moins vicié que celui de la ville. Les médecins sont d’accord sur ce point, et c’est ce qui explique le mouvement sportif qui s’est étendu partout. Parti d’un excellent principe, ce mouvement à quelques peu dévié, et c’est surtout vers une série d’exercices physiques que s’est dirigée la jeunesse. En cela, elle a grand tort ; faire du sport ne signifie pas uniquement pratiquer un sport violent et brutal. Souvent un jeu charmant profitera plus à l’individu qu’une partie violente et acharnée. C’est pourquoi, associant, dans notre esprit, toutes les formes de l’exercice physique en plein air, nous recommandons tout à la fois les jeux les plus calmes, et les exercices les plus violents. Chacun suivant son tempérament propre, suivant sa préférence personnelle y trouvera ce qu’il cherche. Nous parlions tout à l’heure du mouvement qui a porté la jeunesse vers les sports. Il est incontestable que la jeunesse d’aujourd’hui a emboîté le pas aux journaux sportifs, et que beaucoup de jeunes s’intéressent beaucoup plus aux exploits des champions de tous ordres qu’aux questions sociales. C’est évidemment très regrettable, mais c’est un état d’esprit dont nous devons tenir compte. Partant de ce principe que, puisque la jeunesse s’intéressait beaucoup aux sports, il serait peut-être possible d’amener à nous, par ce moyen, les jeunes, un certain nombre de camarades ont fondé, il y a quelques années, des clubs sportifs socialistes, et pour compléter leur œuvres, pour former un bloc compact, ils ont créé une Fédération sportive et athlétique socialiste. Les résultats obtenus jusqu’ici sont assez encourageants, et ils le seraient davantage encore, si les Jeunesses veulent y aider un peu. L’action de cette Fédération s’est trouvée limitée jusqu’ici, à un certain nombre de sports et d’exercices, mais sa force s’accroît ; demain, elle étendra son champ d’action. Basée sur les mêmes principes que la Fédération nationale des jeunesses socialistes, elle est composée de Comités régionaux, comprenant les clubs d’une même région. Deux méthodes ont présidé jusqu’à ce jour à la formation de ces clubs. Elles ont donné de bons résultats l’une et l’autre. La première consiste à créer, à l’intérieur du groupe de Jeunesse socialiste, un groupe sportif. La seconde admet la constitution du club à côté du groupe de Jeunesse, étant entendu que les dirigeants sont obligatoirement membres du Parti. Quelle que soit la formule adoptée la propagande se fait au sein du groupe sportif, et nous avons sous les yeux l’exemple de plusieurs bons camarades, sportmen enragés, qui sont devenues de bons militants, et qui, (ils l’ont avoué à plusieurs reprises) seraient restés indifférents, si le club n’était pas venu les toucher et les conquérir. Puisque l’intérêt propre du militant veut qu’il fasse de l’exercice, et que la mode actuelle dans la jeunesse est aux sports, profitons-en pour essayer de gagner à nous cette jeunesse. Mais il est bien certains qu’il est intéressant de changer, au moins en partie, la mentalité particulière qui règne dans les milieux sportifs. Le jeune qui s’adonne à un sportif tombe en extase devant le champion de cette spécialité, il ne vise qu’a l’égaler, et pour y parvenir, il sacrifiera tout l’harmonie du corps comme sa santé. Il y a là une véritable déformation cérébrale, très répandue dans les milieux sportifs. L’exercice physique ainsi compris, est aussi dangereux, sinon plus, que l’inactivité, et ce n’est pas cela, que nous devons pratiquer chez nous. Nous ne devons pas chercher à créer des champions qui seraient des êtres anormaux, nous devons au contraire chercher à développer tout notre organisme, et non pas telle ou telle du corps, aux dépends de telle autre. Il est pour nous sans grand intérêt de voir un homme champion de course à pied, par exemple, capable de parcourir une quarantaine de kilomètres et être incapable de faire une traction à la barre fixe. D’ailleurs, c’est bien dans l’esprit du Comité national, autant sinon plus pour la propagande socialiste que l’on peut faire dans le milieu sportif, que pour le sport en lui-même, que nous l’avons inscrit en notre programme. L’on nous objectera que la Fédération sportive et Athlétique socialiste pastiche les fédérations sportives bourgeoises, et qu’elle aussi organise ses championnats annuels. A cela nous répondrons qu’il faut parfois tenir compte des contingences. Si la Fédération sportive socialiste du premier jour avait pris le contre-pied des fédérations bourgeoises, elle aurait fort risqué de ne pas toucher les sportmen. Nul doute que dans l’avenir, elle ne rectifie son tir, et que par étapes elle ne revienne à notre conception. Le sport, pour certains camarades se synthétise par certains exercices violents, comme le football par exemple. Bien que n’ayant personnellement aucun grief à apporter contre ce dernier sport, je conçois aisément qu’il n’ait pas le don de plaire à tous. Mais il est d’autres exercices excellents en eux-mêmes, pouvant être pratiqués par tous et par toutes, sans aucun danger, par exemple, le jeu de lawn-tennis, si gracieux et si complet en lui-même. C’est une question de tempérament. Pour résumer en quelques mots ce rapport, nous engageons vivement les Jeunesses à orienter une partie de leur activité dans ce domaine. Qu’elles fondent des clubs sportifs, qu’elles viennent à la Fédération sportive et athlétique socialiste, qu’elles attirent à nous la jeunesse ouvrière embrigadée actuellement dans l’USFSA, fédération bourgeoise à l’esprit désuet et suranné. Leurs membres y trouveront un avantage au point de vue physique. Leurs membres y trouveront un avantage au point de vue physique, leur recrutement sera très largement facilité, et cela aidera à la réalisation du vaste programme que s’est tracée la Fédération nationale des Jeunesses socialistes. ”
Après échange de vues entre Guillou, Evrard, Cambier Strago et Sigogneau, est entendu que cette question reviendra devant la prochaine conférence nationale.
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