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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE |
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Blum/IOS/août 1933
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Léon Blum Conférence de l'IOS , 6e séance, mercredi 23 août 1933, 15 h30 LEON BLUM Je tâcherai de ne pas excéder le temps de parole qui m’est imparti, et d’ailleurs, au moment où nous en sommes, il est assez difficile de dire quelque chose qui n’ait pas déjà été dit ; mais dans une assemblée comme la nôtre, les répétitions valent mieux, malgré tout, que les contradictions.
On a signalé, dans quel instant étrange et émouvant de 1’histoire du monde se tenait notre Conférence. Il n’y a pas de moment peut-être où la courant de la réalité n’ait projeté autour de nous une pareille abondance de preuves de vérité du socialisme. La vérité de la doctrine socialiste semble vraiment s’inscrire autour de nous en lettres de feu. Et pendant qu’à notre doctrine sont apportés ainsi tant d’éclatants et d’évidents témoignages, alors que le capitalisme sous nos yeux atteste plus évidemment qu’il ne l’avait jamais fait son incapacité à accorder les fonctions vitales de toute “ société humaine ” alors en particulier, comme la montrait Vandervelde dans son dernier livre qu’il atteste son incapacité fondamentale à mettre en équilibre le rendement croissant de son appareil productif avec la faculté générale de consommation et d’achat qui se confondent, puisqu’en régime capitaliste il n’y a pas d’autre moyen de consommer et d’acheter; pendant que s’organise autour de nous cette espèce de preuve éclatante de la vérité socialiste tirée de la réalité même, en même temps, nous assistons à un recul de la force politique du socialisme, recul précaire, recul qu’il ne faut pas exagérer, mais qu’il est d’autre part impossible de nier. Nous vivons, en ce moment cette contradiction, et nous vivons dans cette contradiction parce que nous sommes dans un monde où tout porte la marque des contradictions intrinsèques et fondamentales du régime capitaliste, En réalité, la trouble des esprits vient de là ; il vient de ce que, alors que nous devrions constater autour de nous, une de ces affluences d’adhésion et de conviction, une de ces grandes migrations d’esprit comme les religions en ont connues à certains moments de leur histoire, au contraire, nos forces politiques reculent, et elles reculent sous l’effet même de cette crise qui organise autour de nous un tel faisceau de preuves réelles et matérielles. Les forces hostiles au socialisme, cet ensemble de forces hostiles que nous désignons sous la nom générique de fascisme sont elles-mêmes un contrecoup, un effet incident de la crise économique qui démontre, d’autre part, la vérité fondamentale de notre doctrine. Je pense que dans tous les pays où nous avons constaté cette agression du capitalisme contre le socialisme sous la forme fasciste, dans tous ces pays, c’est le grand capitalisme qui en a eu l’initiative. C’est l’initiative et la commandite du grand capitalisme qui sont à l’origine du fascisme italien comme du racisme allemand. Dans tous les pays, et non seulement dans ceux-la on assista au même phénomène. Les institutions démocratiques ont cédé là où, comme disait Dalton, elles sont les moins anciennes, où elles ont le moins de traditions, où reposent sur une éducation moins profonde, mais là même où elles n’ont pas cédé, là où elles ont résisté, nous assistons alors à un investissement de ces institutions par le capitalisme pour mettre la main sur elles et pour essayer de les vider de leur contenu. A l’origine, réflexe défensif du capitalisme atteint dans ses intérêts, menacé dans son privilège, lésé même dans quelque chose qui a presque autant d’importance que sa force matérielle, c’est-à-dire dans la conscience intellectuelle et juridique de sa légitimité. Et pour cette offensive, c’est la crise elle-même qui a fourni à 1’initiative et à la commandite du grand capitalisme ses forces d’appoint. Le grand capitalisme est habitué depuis longtemps à se servir de l’Etat. Il était naturel que pour sa défense et sa protection, il imaginât cette mainmise sur les pouvoirs de l’Etat, que, soit la capitalisme bancaire, soit la grande industrie, a de tout temps essayé de tenir a sa merci; mais c’est la crise qui a mis, en effet, à sa disposition ces masses entières bourgeoises, non pas précisément solidarisées, car les déclassés de la bourgeoisie n’ont pas même pu entrer dans un salariat dont l’entrée leur était interdite par la chômage, mais elle a fait d’eux des déclassés, elle a fait d’eux des espèces de heimatlos sociaux, et c’est parmi eux que toutes les entreprises du capitalisme fasciste ont trouvé ces cohortes de déclassés que tous les aventuriers de l’histoire ont toujours trouvé à leur solde ou à leur suite. Et non seulement, par ses effets secondaires et incidents, la crise a mis ainsi à la disposition de l’initiative fasciste du capitalisme des portions entières de bourgeoisie mais elle a créé ce qui est plus grave encore, dans des fractions entières du prolétariat, le sentiment illusoire que les antagonismes de classes étaient en quelques sorte effacés et abolis par une misère commune et que, dans une même souffrance, on devait chercher à atteindre les mêmes moyens de salut.
Voilà, dans un raccourci bien rapide qui a été fait plus largement et avec plus de netteté avant moi, l’explication même de la contradiction au sein de laquelle nous vivons.
Si cette analyse est exacte, en quoi consiste essentiellement 1a lutte du socialisme international contre la fascisme ? Elle consiste dans la lutte contre la crise qui produit précisément ces effets, non pas qu’il soit possible de l’abolir, d’en empêcher le retour, puisque ces retours périodiques de crise ont en régime capitaliste quelque chose d’inéluctable, mais dans la mesure possible, pour en atténuer, pour en amortir les effets les plus nocifs et les plus meurtriers. Et puisque l’explication intime de la crise réside dans ce déséquilibre chronique du capitalisme la lutte essentielle contre le fascisme consiste dans toute 1a mesure possible a réduire cette marge entre les capacités productrices et les capacités de consommation, et comme nous ne pouvons pas, nous, comme certains grands bourgeois, songer a cette sorte de régression d’ailleurs insensée qui consisterait à essayer de restreindre le rendement de l’appareil productif, nous ne pouvons agir qu’en essayant précisément d’augmenter la capacité générale de consommation du monde, et dans la réalité des choses, et c’est ce qu’a fait le socialisme dans presque tous les pays de l’Europe ; il a essayé de réduire cette marge, et par la même d’atténuer les effets des plus meurtriers de là crise d’abord, en luttant contre les réflexes insensés que dictait, soit au patronat, soit au gouvernement, l’instinct de conservation, le patronat essayant dans le sauve-qui-peut de la concurrence de se tirer d’affaire par la réduction des salaires, le gouvernement n’envisageant dans la crise universelle que ses contrecoups budgétaires et essayant d’y remédier par cette politique de déflation aussi insensée dans son genre que la politique patronale de réduction des salaires. Et, c’est ce qui a dicté l’attitude du parti anglais il y a deux ans, au moment de la crise MacDonald, l’attitude du Parti belge dans sa lutte contre le système fiscal de la coalition réactionnaire, et notre propre attitude, à nous, Parti français, dans toute notre action au Parlement et en dehors du Parlement, lutte non seulement pour maintenir, mais s’il est possible pour augmenter lE taux des salaires, pour l’assistance chômage, pour la semaine de travail réduite à salaire égal, pour les grands travaux nationaux et internationaux, pour la protection et des commerçants et des paysans.
Si davantage de temps m’avait été laissé, j’aurais essayé de montrer à la Conférence en quoi cet effort socialiste pour accroître la capacité générale de consommation et d’achat diffère de l’expérience Roosevelt telle qu’elle est menée en ce moment aux Etats-Unis. Nous avons fait cela, nous l’avons fait sur le plan national et nous avons essayé de le faire et nous continuerons assurément d’essayer de le faire sur le plan international. Et c’est par cette politique que nous pouvons préserver du fascisme les Etats qui ne sont pas encore atteints, cerner et réduire peu à peu les îlots fascistes qui sont dès à présent installés en Europe, et mener la guerre contre le régime qui tyrannise aujourd’hui un certain nombre de pays.
Quand nous avons pour la première fois après la catastrophe allemande délibéré sur ce problème au Bureau ou à l’Exécutif, la même pensée, la même appréhension occupait tous nos esprits. Nous ne voulions pas qu’en menant la lutte implacable contre les gouvernements fascistes, nous courrions le risque de surexciter dans nos propres pays, non encore atteints par le fascisme des animosités nationales contre les pays fascisés ; nous ne voulions pas que la lutte contre le régime hitlérien devint en France ou en Belgique une animosité contre le peuple et la nation allemande, nous ne voulions pas que la lutte contre le fascisme italien devint une animosité des races ou de peuples contre la nation italienne et le peuple italien ; nous avions tous cette préoccupation, mener la guerre contre le fascisme et le racisme sans que cette guerre surexcita à l’intérieur de nos pays le sentiment ou la passion nationaliste.
Je crois que nous y avons réussi dans une certaine mesure ; pour ma part, je suis assez fier, je l’avoue, assez orgueilleux de constater de quelle façon la masse de l’opinion française a réagi vis-à-vis des évènements d’Allemagne. Il est à mon sens remarquable qu’elle n’ait pas devant des événements comme ceux-là manifesté davantage une inclination, une attraction vers la nationalisme français, et le fait que la France ait pu garder devant ces événements, dans la masse de son opinion autant de sang-froid et de maîtrise d’elle-même, prouve malgré tout, que la propagande socialiste en France depuis quinze ans, que la propagande internationale du socialisme n’a pas été une œuvre vaine. Mais aujourd’hui, et les débats de cette conférence l’ont montré, il y a un autre point qui selon moi, tout autant que celui que je viens d’indiquer exige de notre part un contrôle attentif et un contrôle vigilant sur nous-mêmes. Le fait accompli, le succès en ce monde, exercent toujours une attraction ; quand des moyens ont réussi pour un but donné, on est assez naturellement, assez humainement tenté de se demander si les mêmes moyens ne pourront pas réussir même pour un but contraire et quelque chose d’analogue peut arriver, ou est même arrivé dans une certaine mesure en ce qui concerne l’idéologie et la sentimenta1ité fascistes. Le fascisme repose à la base sur une exaspération où sur une exaltation du sentiment national ; il a, comme je le montrais tout à l’heure, disposé comme troupes d’assaut de masses déclassées et désespérées ; il a donné à cette masse hétérogène des mots d’ordre élémentaires en leur désignant comme but essentiel et même unique la conquête du pouvoir. Le pouvoir tel qu’il le concevait et tel qu’il l’exerce était un pouvoir dictatorial et dans les régimes fascistes, c’est peu de dire que les libertés soient supprimés en fait, elles sont même condamnées en principe, ce qui est infiniment plus redoutable. Enfin certains régimes fascistes ont laissé entrevoir aux masses populaires que cette possession du pouvoir pourrait permettre sous des formes variables une rénovation, une régénération sociale. Et cette attraction de l’exemple risque de s’exercer au moment précis ou justement nous constatons le recul politique de l’internationale et l’effondrement dans son pays même de la Section la plus puissante de l’Internationale socialiste ; ce risque s’exerce au moment ou, d’autre part, certains observateurs croient constater un repli du capitalisme lui-même sur la terrain proprement national.
Emile Vandervelde (Président) La décision prise ce matin me met dans l’obligation désagréable d’avertir Léon Blum qu’il a parlé 15 minutes et que réglementairement il n’a droit de parler que 20 minutes; Blum était absent ce matin, il ne connaissait pas la décision et il s’est préparé à parler plus longuement; je demande à la Conférence si elle m’autorise à ne pas regarder l’heure très scrupuleusement (marques d’assentiment).
Léon Blum (France) Je suis tout à fait honteux de paraître profiter d’une faveur ; j’avoue que je ne me doutais pas que j’eusse déjà parlé 15 minutes. J’espérais m’en tirer dans un temps sensiblement égal au temps réglementé. Je vais aller néanmoins la plus vite possible et je remercie la Conférence de la bienveillance qu’elle veut bien me témoigner.
D’autre part, l’expérience a prouvé que ce qui avait rendu le fascisme et l’hitlérisme provisoirement inévitable dans les pays où ils se sont installés, c’était précisément le cumul entre ses mains de la force légale qui lui donnait le pouvoir et de la force révolutionnaire que lui donnait son organisation propre. Il est tout à fait logique et naturel de se dire - c’est la pensée qui durant des années a inspiré et dirigé la politique de nos camarades allemands - que la meilleure façon du barrer la route au fascisme c’est de lui fermer la route du pouvoir, et la meilleure façon de lui barrer la route, c’est assurément quand nous le pouvons, de l’occuper nous-mêmes. C’est ainsi que sont nés tous ces différents problèmes qui ont été au fond le véritable sujet de nos débats dans cette Conférence et sur lesquels précisément ceux-ci ont déjà apporté des éclaircissements si utiles et si importants. Par exemple, je n’aurai plus rien à dire de la question du repli dans le cadre national, puisque là-dessus, maintenant nous sommes tous d’accord ou nous avons toujours été d’accord. Les paroles de Vandervelde et d’Adler ont rencontré ici un assentiment unanime ; nous sommes tous d’accord pour penser qu’il ne nous faut pas moins d’internationalisme mais plus d’internationalisme, que tout notre effort doit se concentrer à donner à l’Internationale une consistance de plus en plus solide, et que l’action nationale, toujours nécessaire, demain comme elle l’a été hier, doit garder une claire conscience de sa nature, de ses limites, et de sa direction, c’est-à-dire être toujours de plus en plus clairement inspirée elle-même par l’esprit international et par l’aspiration internationale. En ce qui concerne le problème des classes moyennes qui n’est pas nouveau, on a des textes c1assiques de Marx, en particulier de "La lutte des classes en France", mais sur lesquelles, en effet, on a eu raison de le rappeler, les événements fascistes ont attiré de nouveau l’attention, et il me semble avoir constaté ici un accord de pensée assez général. Là encore, si la temps n’était pas mesuré, on pourrait entrer dans des analyses qui ne manqueraient pas de quelque caractère instructif. Le mot de “ classe moyenne ” est un des mots les plus complexes, et par là même des plus vagues de notre langue socialiste. Engels, dans son livre sur la situation des classes laborieuses en Angleterre l’emploie comme synonyme de bourgeoisie possédante dans le sens où nous-mêmes entendons le capitalisme et la bourgeoisie. Il en a été ainsi longtemps, même en Allemagne, tant que l’aristocratie allemande a gardé un caractère féodal et que la bourgeoisie paraissait une classe intermédiaire. Par ce mot de “ classe moyenne ”. nous entendons tout à la fois les paysans et certaines catégories de fonctionnaires, les artisans, le Petit commerce, et nous entendons aussi - il semble même que dans certains esprits cette dernière acception soit celle qui prévaille - nous entendons aussi les cadres techniques composés à la fois des hommes de profession libérale, des agents supérieurs d’entreprise que le capitalisme organise et entretient autour de lui. Sur tous ces points, il me semble que chacun a été d’accord pour penser que notre propagande devait essayer de les pénétrer comme elle l’a d’ailleurs toujours fait. Si je voulais rappeler ce que nous avons fait, nous, parti français, dans le sens de la propagande paysanne, sans rien atténuer de notre doctrine socialiste, dans le sens de la propagande parmi les petits commerçants et parmi les techniciens, la conférence se rendrait compte que notre Parti, comme assurément tous les autres, n’a jamais omis cette action. Mais que pouvons-nous faire de plus que d’essayer de leur démontrer par la propagande générale de nos partis, que leurs intérêts présents et futurs, coïncident avec ceux du prolétariat lui-même, que dans le régime socialiste seul ils trouveront la sécurité et, d’autre part, dans le présent, que d’atténuer de notre mieux pour eux comme pour le prolétariat lui-même, les conséquences les plus nocives et les plus meurtrière de la crise universelle. Nous ne pouvons pas aller au-delà, et personne que je sache ne nous a demandé de fabriquer un socialisme atténué, édulcoré et comme honteux de lui-même à l’usage de la propagande dans les classes moyennes. Personne ne nous a demandé alors que notre rôle et notre devoir est de les attirer de nous, de perdre de vue que c’est malgré tout le prolétariat, la classe ouvrière, qui doit rester la base immuable et indestructible de notre propagande et de notre action.
En ce qui concerne le problème de la démocratie c’est une leçon évidente de chose que nous avons entendu dire ici qu’il fallait la maintenir de tous nos efforts dans les pays où elle existe encore, et qu’en revanche dans les pays où elle n’existe plus, ce serait à la fois une dérision et une contradiction absurde que de réduire ceux de nos camarades qui luttent contre ces dictatures et ces tyrannies à ne se servir contre elles que des moyens démocratiques et légaux. Mais sur ce concept même de la démocratie, des opinions assez différentes ont été énoncées ici, et à cet égard, dans la mesure où je le puis, peut-être l’effort d’éclaircissement que j’essaierai d’apporter à mon tour ne sera-t-il pas complètement inutile ? D’abord, gardons-nous d’une première confusion entre la démocratie et les institutions parlementaires. Ce ne sont pas deux idées identiques, ni même deux idées nécessairement parentes. Le régime parlementaire n’est démocratique, ni par ses origines, ni pas son essence ; il n’est devenu une institution démocratique que le jour où l’on y a pour ainsi dire injecté le suffrage universel qui, lui, est en effet, la formule de la démocratie politique. La démocratie politique, c’est le suffrage universel, expression de l’égalité civique, et c’est l’ensemble des lois garantissant les libertés civiques et politiques qui, dans la mesure où cela est possible en régime capitaliste – car cela n’est pas complètement possible, sans quoi nous perdrions une partie de notre raison d’être – assure au suffrage universel le maximum de liberté.
Voilà ce qu’est la démocratie du point de vue bourgeois ou même, si vous voulez du point de vue républicain, de notre point de vue elle est cela, si vous le voulez, mais, elle est en même temps tout autre chose. Nous pensons, nous socialistes, qu’il n’y a pas d’égalité civique et d’égalité politique complète possible tant que les inéga1ités de classe subsisteront, et pour nous la démocratie républicaine ou bourgeoise telle qu’elle est aujourd’hui est avant tout la condition du développement de l’organisation ouvrière, elle est aussi l’ensemble des garanties auxquelles la classe ouvrière n’a pas la droit de renoncer, et par elle il subsiste des moyens légaux de libération et d’affranchissement. Pas plus que la classe ouvrière ne peut s’enfermer dans ces moyens légaux, elle ne peut se les interdire à elle-même par une renonciation à l’appareil démocratique de la bourgeoisie. C’est cela, je crois, très exactement, la conception de la politique du point de vue socialiste, telle que l’a toujours exprimée Jaurès. Et c’est d’ailleurs un ensemble d’idées de ce genre qui avait acheminé sa pensée et sa raison de la conception républicaine et démocratique à la conception socialiste. Mais si les institutions démocratiques restent pour nous une condition si importante de notre développement et une garantie si importante qu’il y a une possibilité, qu’il subsiste une possibilité de libération totale du prolétariat par les moyens légaux, n’oublions pas que les moyens essentiels restent malgré tout l’existence du socialisme et 1’existence dans chaque pays de partis conservant leur caractère de classe par leur contact intime avec la masse ouvrière et prolétarienne elle-même. De telle sorte que le problème politique à mes yeux tel qu’il se pose dans chaque pays sous des aspects et des conditions différente, c’est en réalité de concilier le maintien des institutions démocratiques avec la nécessité de préserver l’autonomie et le caractère de classe des partis ouvriers. C’est ce problème qui se pose dans chaque pays avec des différences de pays à pays, avec quelquefois et même souvent des divergences de vues a l’intérieur des pays eux-mêmes. Mais l’essentiel, je crois, est que nous soyons d’accord pour penser, comme je le crois nous le pensons tous, que la démocratie bourgeoise n’est pas à nos yeux une fin en soit, qu’elle est à nos yeux essentiellement un moyen de développement de la démocratie socialiste et une garantie qu’il existe pour cette démocratie socialiste un moyen d’arriver à ses fins par les chemins légaux.
| Et enfin, je voudrais toucher très rapidement au problème qui évidemment a paru à la Conférence à la fois la plus complexe et le plus difficile, le problème du pouvoir. Le pouvoir, c’est naturellement un mot très attrayant, et c’est en même temps un mot complexe ; il signifie beaucoup de choses qui n’ont entre elles qu’un rapport assez approché. Pour certains d’entre nous, le pouvoir, la prise du pouvoir, cela ne signifie pas autre chose que la dictature du prolétariat; pour d’autres, cela signifie principalement l’exercice du pouvoir gouvernemental dans les cadres de la société présente et même l’exercice de ce pouvoir en collaboration, avec d’autres partis politiques. Nous sommes un parti, c’est dans la définition même du socialisme marxiste, qui s’assigne pour but la conquête du pouvoir politique, mais qui s’assigne pour but la conquête du pouvoir politique en vue de transformer par la détention du pouvoir politique le régime de la propriété, l’organisation économique, et c’est cette transformation, qui est par elle-même, qui est seule la révolution sociale telle que nous la concevons. Nous nous sommes toujours séparés de l’anarchie en ce que nous jugions la détention du pouvoir nécessaire pour la transformation sociale; et un des points sur lesquels nous nous sommes séparés du bolchevisme, c’est que nous n’avons jamais considéré que la détention du pouvoir politique même totale fut a elle seule une condition suffisante de la transformation économique de la société ; condition nécessaire, mais non pas condition suffisante, Voilà, je crois, ce qui est à la base même de la pensée socialiste interprétée le plus clairement que je le puis. En ce qui me concerne, j’ai, il y a bien des années déjà, proposé à mes camarades français une distinction que je crois encore utile, que je ne crois pas encore frappée de caducité. Je leur ai demandé pour plus de clarté encore de distinguer entre cette conception de la conquête révolutionnaire du pouvoir, moyen nécessaire et non suffisant pour transformer le régime même de la propriété, et ce que j’avais appelé, ce que nous avons appelés l’exercice du pouvoir dans le cadre de la société capitaliste, exercice du pouvoir qui est une conséquence parfois inéluctable du fait même que nous pratiquons l’action parlementaire. Nos camarades anglais il y a quelques années, nos camarades danois et suédois, nous même, si demain, par exemple, un congres français autorisait la participation ministérielle, nous exercerions les uns et les autres le pouvoir à nous seuls ou en collaboration, mais nous ne l’aurions pas conquis au sens révolutionnaire du mot ; et cette possession du pouvoir en vertu du jeu légal des institutions existantes et dans la cadre de la société existante ne serait pas la conquête qui permet la transformation révolutionnaire. Eh bien, quand on parle d’aller au pouvoir, est-ce qu’on pense à l’exercice ou à la conquête ? Est-ce qu’on peut dire, qu’un parti qui est arrivé au pouvoir par la jeu 1égal des institutions dans la cadre de la constitution et dans la cadre du régime capitaliste, peut profiter, doit profiter de sa présence au pouvoir pour transformer l’exercice légal en conquête révolutionnaire ? Est-ce que l’on peut dire qu’il devrait tenter cette transformation même si les conditions nationales et internationales ne permettaient pas la transformation du régime social qui est par elle-même la révolution ? Et est-ce qu’en fait, dans une hypothèse comme celle-ci, il existe en Europe des pays où les conditions objectives permettraient cette transformation ? Voilà quel devrait être le schéma d’une discussion approfondie sur ce sujet du pouvoir, et naturellement je n’essaierai même pas d’y entrer; mais voici, selon moi, quelle est l’idée directrice qui doit en cette matière complexe et difficile diriger notre pensée et le cas échéant gouverner notre action. La responsabilité des dirigeants, des hommes qui à un moment donné ont le mandat de représenter le Parti socialiste, elle n’est rien, ils sont habitués à l’exposer, il sont habitués à courir toutes espèces de risques. Ce n’est pas devant cette responsabilité qu’il y ait jamais lieu de reculer ;. ce n’est rien, mais ce qui est quelque chose, ce qui est même beaucoup, ce qui est un capital inestimable et à certains égards irremplaçable, c’est la conviction des masses ouvrières, c’est leur enthousiasme, c’est leur esprit de sacrifices, c’est leur foi dans le socialisme; et c’est ce capital inestimable et en partie irremplaçable que nous n’ avons pas le droit de gaspiller, de compromettre, que nous n’avons pas la droit d’aventurer dans quelque chose qui ne serait pas le socialisme. Or, la possession du pouvoir ne permet pas à elle seule de réaliser le socialisme ; si nous pouvions penser le contraire, nous aurions eu tort il y a 12 ou 13 ans de rompre avec Moscou et le communisme. Je conçois admirablement quant à moi, et je l’ai toujours dit, qu’on occupe le pouvoir à titre préventif, à titre défensif par tous les moyens et en profitant de toute occasion pour occuper la place et par là même en barrer les avenues devant le fascisme; je comprends qu’on profite même de l’exercice du pouvoir dans le cadre légal pour essayer de vider de son mieux le capitalisme de sa force de résistance ou de sa force d’agression; mais nous devons ni entretenir en nous-même, ni créer et laisser se créer autour de nous 1’illusion que cette possession du pouvoir dans le cadre capitaliste et national, si les circonstances nous obligent à y demeurer, puisse amener la réalisation même partielle du régime collectiviste. Nous n’avons pas à marquer du signe socialiste des essais de forme intermédiaire entre le capitalisme et le socialisme dans le cadre national. Quand nous nous sommes trouvés vis-à-vis du bolchevisme, nous avons tous été d’accord pour avertir la classe ouvrière et dire : ne vous méprenez pas, ne vous trompez pas, déclinez le cas échéant les possibilités de l’échec, comme de même vous ne pourrez pas vous prévaloir du succès; ceci n’est pas réellement le socialisme. Le même sentiment doit nous guider a fortiori vis-à-vis des formes intermédiaires – je prends cette expression parce qu’elle est claire, je crois – qui seraient introduites par le capitalisme lui-même, à la faveur des différents pouvoirs dictatoriaux qui s’installent en ce moment dans divers pays. Et quant à nous, socialistes, si les conjonctures nationales et internationales étaient telles que, installée au pouvoir, nous puissions sortir du cadre capitaliste et national, alors notre devoir ne serait pas le moins du monde d’essayer d’ériger des formes intermédiaires entre le capitalisme et le collectivisme, mais d’essayer de détruire dans sa racine le capitalisme lui-même et de tenter dès ce moment d’entrer dans le cadre socialiste.
Voila, camarades, 1’essentiel de ce que je voulais vous dire, et je ne retiendrai qu’un très petit nombre de minutes votre attention, la conclusion est nécessairement que notre lutte contre le fascisme doit conserver le caractère d’intransigeance que nous lui avions imprimé jusqu’à présent. Aucune complaisance, même par cette attraction que j’essayais d’analyser tout l’heure, aucune complaisance vis-à-vis de la sentimentalité et de l’idéologie fascistes; aucun accommodement vis-à-vis de gouvernements fascistes, soit à l’intérieur comme cela a été si malheureusement tenté, soit à l’extérieur; devoir pour les partis étrangers d’organiser autour des gouvernements fascistes ce que j’ai appelé autrefois la quarantaine, d’organiser autour d’eux cette espèce d’asphyxie morale qui est pour eux à bien des égards, et l’histoire du racisme- dans ces derniers mois l’a déjà prouvé, le plus grand obstacle et le commencement du châtiment.
Je rencontre ici une question sur laquelle je suis habilité pour donner un mot de réponse en parlant, je crois au nom de tous mes camarades français, à Niedzialkowski et à Nenni qui ont fait allusion au Pacte à Quatre. Ils peuvent, je crois, nous rendre ce témoignage que nous avons toujours unanimement lutté avec la même énergie contre ce funeste préjugé d’ancien régime selon lequel la forme intérieure de gouvernement devrait être indifférente aux gouvernements et aux diplomates étrangers, suivant lequel dans la gestion des affaires extérieures, un gouvernement ne devrait consulter que ce qu’il appelle son intérêt égoïste sans tenir compte des conditions intérieures de vie du gouvernement avec lequel il traite ou vis-à-vis duquel il agit. Je ne voudrais pas choquer mes camarades anglais, mais je leur dirais que je ne connais rien pour ma part de plus répugnant pour l’histoire que la bassesse de gouvernements démocratiques d’aujourd’hui vis-à-vis de Mussolini, depuis un exemple déjà vieux de quelques siècles et qui était la bassesse des vieilles royauté légitimes vis-à-vis du régicide Cromwell ; c’est pour cette comparaison que je leur demande pardon et que je m’excuse auprès d’eux (rires).
Voilà notre sentiment à tous ; cependant nous n’avons pas mené campagne contre le Pacte à Quatre amendé, qui laissait subsister dans son intégrité la SDN, parce que dans cette lutte contre la régime fasciste installé en Europe il y a tout de même, je crois, une limite qui s’impose à nous, qui s’imposera toujours à tous les partis socialistes. Il y a des moments où entre en conflit ce désir d’infliger toujours aux gouvernements fascistes des échecs diminuant leur crédit dans leur propre pays, et d’autre part, ce qui nous parait, à tort ou à raison, être l’intérêt de la paix, du désarmement, le succès possible ou la moindre échec possible de réunions et d’organisations internationales.
Voilà le sentiment qui nous a guidé et qui pourra nous guider encore ; je ne crois pas que l’Internationale puisse nous en faire reproche. Nous ne voulons pas toucher des mains sanglantes, mais si à certains moments, fût-ce par suite de combinaisons suspectes, elles semblent nous apporter une parcelle de chances ou un rudiment d’organisation de paix en Europe, même de mains sanglantes, je crois pour ma part que nous ne pouvons pas le refuser.
Je voulais donner cette explication sur le Pacte à quatre, car les observations apportées à cet égard avaient été sensibles à tous nos camarades de la délégation française. Je voudrais que cette explication pût les satisfaire et satisfaire l’ensemble de la Conférence
Maintenant, cela dit, une seule question se pose, une question pratique: à quoi la Conférence va-t-elle aboutir ? Quel sera le terme, la sanction de ces travaux ? Je voudrais pour ma part que ce fût une espèce de résolution prise par l’Internationale vis-à-vis d’elle-même ; je voudrais pour ma part voir l’Internationale plus sûre de sa cohérence et de sa force; je voudrais qu’elle fut moins en défiance de sa fragilité. A certains égards, son cas me parait assez semblable à celui de la SDN.Il me semble qu’au sein même de l’Internationale, d’une part, les sections nationales restent encore trop soucieuses et des nécessités ou même des simples commodités de leur action nationale présente, et que, d’autre part, l’Internationale, comme la SDN. attachée à la règle de l’unanimité, entre difficilement dans la rôle d’arbitrage catégorique qui deviendrait un rôle de décision. Je voudrais que pour nous aussi la notion de souveraineté nationale abdiquât de plus en plus devant la notion de d’autorité, de l’action et de la décision internationales (très bien). Si j’avais à m’aventurer sur un des problèmes qui sont portés à l’ordre du jour, je montrerais, je crois sans peine que sur la question de savoir ce que feront les partis socialistes pour la cas où une guerre éclaterait, l’action des partis socialistes dépendra avant tout essentiellement, de ce que sera l’action de l’Internationale elle-même, du courage et de la décision et de l’audace avec lesquels elle saura, la cas échéant, tracer ou même dicter à chacun son devoir national.
Voilà, je crois, vis-à-vis de nous-mêmes, la leçon d’action intime que nous devrions remporter de cette Conférence. Pour le surplus, je me rallie entièrement, en ce qui me concerne, au programme d’action positive que notre ami Dalton a apporté ici, visant soit la question autrichienne, soit la question du désarmement de l’Allemagne ou la question étroitement connexe du désarmement général et de l’organisation du contrôle ...
RENAUDEL : Très bien.
LEON BLUM : - Je pense,…… Je vois bien que vous m’approuvez depuis le commencement de mon discours (rires), je voudrais que ce programme d’action positive fut précédé ou d’un manifeste ou de considérants théoriques dont il me sera, je crois, facile de tirer la substance du rapport d’Adler et du discours de Vandervelde qui ont rencontré ici l’adhésion générale. Je voudrais pour ma part, et j’en fais en mon nom personnel mais fermement la proposition, je voudrais que quelque chose fut ajouté, je ne peux parler, bien entendu, que d’après la connaissance que j’ai de la classe ouvrière française, mais sans doute , ce que je dirais sera-t-il vrai pour d’autres classes ouvrières continentales ou européenne. Ce dont la classe ouvrière a la plus, besoin c’est d’un stimulant moral, c’est de quelque chose qui lui apporte un renouveau, non pas de conviction socialiste, mais peut-être de réconfort et de confiance à la suite d’événements internationaux sur lesquels je n’ai pas voulu insister, car il n’y a rien de plus cruel vraiment que cette espèce d’expérience de vivisection à laquelle nous nous sommes livrés les uns et les autres sur le cas de nos malheureux camarades d’Allemagne; ce dont elle a le plus besoin, c’est cela, je crois en être à peu près sûr, et aussi ce qui pourrait apporter à la classe ouvrière française cette espèce de tonique, de stimulant moral et psychologique dont elle a besoin, ce serait un pas fait dans la voie de la réorganisation organique de la classe ouvrière et du prolétariat. Et je suis convaincu que, si l’unité Prolétarienne était réalisée, elle produirait dans un pays comme la France bien autre chose qu’une addition arithmétique et matérielle de forces, elle produirait une sorte de multiplication psychologique et morale de la volonté d’action de l’activité, et du désir de luttes et de victoires. Nous avons à Zurich pris une décision dans ce sens; les efforts d’unité organique peuvent se concevoir sur trois plans : sur le plan de base par des effets spontanés de la classe ouvrière elle-même, parmi des fractions, des portions de la classe ouvrière placée en face de mêmes conditions de lutte ou des mêmes misères et souffrances particulières comme c’est le cas d’un mouvement de grève, par exemple; ils peuvent se concevoir sur le plan national, ils peuvent se concevoir sur le plan international.
GRUMBACH : A Strasbourg ou à Mulhouse, au cours des grèves qui se déroulent, les communistes comme d’habitude poignardent les socialistes dans le dos.
LEON BLUM : Mon cher Grumbach, c’est à mon avis une raison de plus. Je crois qu’il est tout à fait vain de vouloir légiférer entre nous sur les actions spontanées de la masse soit pour les autoriser, soit pour les interdire. Car du fait même qu’elles sont spontanées elle ont dans certains cas le caractère da véritables nécessités (très bien).
Sur le plan national, pour ma part, je les redoute, et je ne conseillerais jamais à l’Internationale de s’y engager ; c’est là que la IIIe internationale a voulu nous attirer, et c’est sur des négociations dans le cadre national que les pièges et les embûches sont le plus à redouter. Je voudrais que nous fissions un effort, que nous renouvelions l’effort de Zurich sur le plan international, mais en ce qui me concerne, je ne voudrais pas que nous le fissions seuls ; je voudrais que la Fédération internationale syndicale y fut associée et que notre Exécutif ou notre Bureau eussent mandat d’entrer sur ce point, sur ce plan, en contact et en conversation avec la FSI. Je considère quant à moi que la conjonction, la coordination d’action qui s’est établie dans ces derniers mois entre la FSI et l’IOS elle-même, comme l’un des événements les plus heureux et comme l’un des éléments de force nouvelle le plus important que nous ayons à enregistrer ; non seulement je ne voudrais pas que ma proposition pût affaiblir cette conjonction d’efforts, mais je voudrais qu’elle la fortifiât encore davantage. Je sais tout ce qu’a dit Grumbach, ce qu’a rappelé Wels dans son discours d’hier, je sais ce qu’a été et ce qu’est encore l’action communiste, mais je répète qu’à mon avis, c’est une raison de plus pour n’épargner aucun effort dépendant de nous pour faire cesser cette situation atroce et pour qu’à l’horreur d’un désastre comme le désastre allemand ne s’ajoute pas encore l’horreur indicible des luttes intestines entre des portions de la même classe ouvrière martyrisée par les même bourreaux (très bien vifs appldts).
Représentez-vous d’ailleurs que tout ce que nous imaginons comme moyen d’action, tout ce que nous imaginons même au point de vue de l’exercice légal du pouvoir, même au point de vue de la collaboration gouvernementale a plus forte raison de la conquête révolutionnaire, tout ce que nous imaginons comme moyen de lutte immédiat contre le fascisme, comme le boycottage, comme la grève générale en cas de menace fasciste caractérisée, tout ce que nous imaginons comme moyen de défense suprême du prolétariat contre la guerre qu’il s’agisse également de la grève générale ou même d’action insurrectionnelle, tout cela n’a sa pleine efficacité que si précisément l’unité prolétarienne est rétablie. C’est ainsi la logique même de notre débat, de notre ordre du jour, qui nous conduit à cette conclusion. Si nous faisons cela, camarades si nous épuisons l’espèce de programme sommaire qu’après tant de mes amis je viens de tracer à la tribune, je crois que nous pourrons quitter cette Conférence avec une confiance accrue dans les destinés du socialisme international, je crois que l’Internationale aura montré toute la plénitude de sa force et qu’elle aura prouvé que dans la lutte pour la libération du prolétariat, la volonté et l’intelligence humaine concordent avec la nécessité des choses. (salves répétées d’appldts).
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