La récente réédition de « Moi, Clément Duval, anarchiste & bagnard » (Nana éditions, 2019, 288p, 19€), mémoires « incomplètes » de Clément Duval (1850-1935) publiés en 1991 aux Éditions ouvrières (devenues éditions de l’Atelier), nous donne l’occasion de relire l’article que lui consacrait à l’époque notre ami Guy Bordes dans le n°232 de L’OURS. L’ouvrage dont la présentation a été « légèrement complétée et corrigée » par Marianne Enckell, tenant compte des travaux sur le bagne et la mouvement anarchiste depuis sa première édition, bénéficie d’une mise en page élégante et d’une reproduction de documents soignée« Dans le cadre de leur politique éditoriale de mise en valeur du patrimoine idéologique du monde ouvrier, et de sa mémoire militante, les Editions ouvrières, par le truchement de leur collection « La part des hommes », poursuivent la publication de nombreux documents, souvent oubliés, parfois méconnus, toujours intéressants.
C’est le cas du livre de Marianne Enckell.
Il s’agit des mémoires incomplètes (mais l’essentiel y est) de l’anarchiste Clément Duval, entrecoupées de textes explicatifs et présentants ainsi que de rappels historiques rédigés par la présentatrice.
Peu connu de la postérité, Clément Duval fut un anarchiste convaincu, qui expia sans jamais renoncer à ses idées un crime somme toute assez véniel (blessure à agent lors de son arrestation) mais qui concluait une longue série de cambriolages, présentés par les anarchistes comme des épisodes de « reprise individuelle ». Son livre s’ajoute aux témoignages nombreux sur la vie au bagne, qui fut un effroyable moment de l’histoire judiciaire française. II a l’avantage de la sincérité, de la vie dans le récit, de la spontanéité dans la réflexion. Si on l’en croit (et rien ne semble s’y opposer) Duval fut une belle figure du mouvement ouvrier, même si les voies qu’il choisit furent contestables. II avait l’âme droite et une grande élévation d’esprit, et il conserva ces qualités dans les pires épreuves.
Guy Bordes