par Sylvain Boulouque
La référence à une Ukraine fasciste n’est pas vraiment une nouveauté, les thuriféraires du régime bolchevique l’avaient déjà utilisée pour dénoncer tous ceux qui n’étaient pas avec eux. A propos de Jean-Pierre Ducret, La liberté ou la mort. La révolution russe en Ukraine. L’histoire de Nestor Makhno. Les éditions libertaires, 204 p. 25 €
Jean-Pierre Ducret, qui avait publié en 1984 une anthologie des textes de Makhno et un recueil d’affiches anarchistes de la Guerre d’Espagne, nous propose une biographie illustrée des cosaques de la liberté. Makhno et la makhnovchina ne sont pas une nouveauté en bande dessinée. Après celles de François Homburger (aux éditions libertaires, déjà), de Bruno Loth (la Boîte à Bulles) et de Philippe Thirault et Roberto Zaghi (humanoïdes), il propose sa version, différente des trois précédentes. Le trait est simple : noir (cela s’impose), blanc et gris sans pour autant être de la ligne claire. L’auteur utilise les témoignages des différents acteurs de la période (Alexandre Berkman, principalement, Emma Goldman, Marcel Body, Mauricius, etc.) pour éclairer la vie de l’anarchiste ukrainien et plus largement l’histoire de la Russie sous le joug communiste, de l’armée rouge et de la Tchéka – déjà !!!
Makhno incarne la révolte des paysans ukrainiens entre le Dniepr et le Don au nord de la mer d’Azow. Né en octobre 1888 à Gouliaï-Polié, révolté par les injustices faites aux paysans, il s’engage dans le mouvement révolutionnaire russe. Condamné à mort, sa peine est commuée à la déportation au bagne en Sibérie en 1910, où il reste jusqu’en 1917.
Systématiquement, pour rendre le récit plus agréable à suivre, Jean-Pierre Ducret mêle les récits du quotidien et la restitution des combats politiques. A partir de 1918, Makhno prend la tête des paysans soulevés et organise une république autogérée au sud de l’Ukraine, reprenant la région aux blancs de Denikine et de Petlioura, sauvant ainsi le régime bolchevik. L’auteur illustre ses expériences par le récit des mises en œuvre culturelles, par exemple, avec des ateliers théâtre autour de Rimbaud. Très vite, Lénine et Trotski décident de mettre fin à l’expérience et d’envoyer les troupes. Les combattants de la liberté sont réprimés et Emma Goldman et Alexandre Berkman fuient la Russie soviétique.
Un premier volume qui laisse espérer une suite.
Toute référence à l’actualité étant bien évidement voulue.